Évaluations d’écoles et d’établissements : de grandes divergences et des désespérances

Avant d’entrer dans le vif du sujet, rappelons comment doivent se passer ces évaluations et quel but elles sont censées servir.

Après une phase d’auto-évaluation, l’école ou l’établissement reçoit des visiteurs qui viennent observer des cours et échanger avec les différents personnels de l’établissement et autres membres de la communauté éducative (en gros, avec des parents d’élèves). Grâce à ces deux phases d’évaluation, une sorte de rapport est établi qui permet à l’équipe de bâtir son projet, lui-aussi, d’école ou d’établissement.

Ce processus semble se dérouler plus ou moins bien selon les lieux où il a lieu. Il y a des IEN et des chefs d’établissement qui ont bien compris que les questionnaires proposés par l’Education Nationale pour la phase d’auto-évaluation ne tiennent pas la route. En effet, ils confinent à l’auto-flagellation pour les enseignants et sont de véritables enquêtes de satisfaction en direction des élèves et de leurs parents. Donc, les personnels encadrants raisonnables s’en détachent et proposent une réflexion d’équipe.

De même, concernant la deuxième phase, certaines académies ont pris le parti de proposer à des enseignants dont l’établissement a été évalué de se joindre aux groupes d’évaluateurs externes afin de visiter d’autres établissements. Et elles le font sans trier les professeurs pour ne garder que les plus dociles et les plus acquis « à la cause ».

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Troubles dys : une fatalité d’opérette ?

« Hélène.
– Qu’est-ce que je vous disais, la Fatalité.
Calchas.
– C’est votre excuse… »

La Belle Hélène
Opéra-bouffe en trois actes de Jacques Offenbach
Paroles de Henri Meilhac et Ludovic Halévy

Chez Offenbach, la Fatalité est l’excuse idéale d’Hélène, pour sa cuisse légère, lorsqu’elle abandonne son mari Ménélas pour suivre le beau Pâris. Les troubles dys, depuis quelques décennies, offrent eux aussi une excuse confortable, une Fatalité d’opérette, à l’échec scolaire cette fois.

En France, le nombre d’orthophonistes a augmenté de 72 % entre 1995 et 2010. En 2013, dans son essai A l’école des dyslexiques. Naturaliser ou combattre l’échec scolaire ?, la maîtresse de conférence Sandrine Garcia montre que le diagnostic de dyslexie s’applique le plus souvent à des élèves dont les difficultés de lecture trouvent leur origine dans les modalités d’apprentissage auxquelles ils ont été confrontés, et non pas dans « des troubles spécifiques de l’apprentissage de la lecture » attribués à des déficits propres à l’enfant et que cette situation aboutit à une médicalisation abusive des difficultés prise en charge par des professionnels extérieurs à l’école, prêts à « traiter » le handicap prétendu « naturel » qui serait celui de l’enfant. [1]

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Le mot du président : Représenter sans déformer

Edito de la revue Quinzaine universitaire n°1464 du 15 avril 2022

Cet éditorial est garanti sans élections présidentielles.

Alors que nous sommes gavés d’analyses, de prises de positions et d’injonctions qui nous sautent à la figure dès que nous ouvrons un journal ou un écran, voire dès que nous adressons la parole à un ami ou un collègue, il me semble nécessaire de vous proposer un espace qui soit autre chose que pure immédiateté.

Si un syndicat professionnel et représentatif comme le SNALC ne pose pas les constats et ne tente pas l’expression objective de l’état de notre système éducatif, qui le fera ? Nous avons toujours eu comme principe fondateur notre indépendance, et partons du principe que les personnels de l’Éducation nationale et du Supérieur, qui ont charge d’âmes, n’ont pas besoin de directeurs de conscience pour glisser — ou ne pas glisser — un bulletin dans une urne.

Laissez-moi donc plutôt vous parler des mathématiques, qu’on tente in extremis de réintroduire en catastrophe après la saignée opérée lors de la réforme du lycée. Ou des colloques que le SNALC organise dans de nombreuses académies sur la souffrance au travail et les possibilités d’aller voir ailleurs, et qui font hélas salle comble. Je dis « hélas » car j’aimerais nous voir échanger, entre professionnels reconnus et respectés, sur les modalités de la transmission des savoirs, les techniques pédagogiques, les cultures professionnelles du premier et du second degré, la richesse de la voie professionnelle, plutôt que sur la désaffection des concours, la précarité des contractuels et le meilleur moyen de monter son auto-entreprise pour quitter au plus vite le navire.

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