La promesse de réévaluation de nos salaires nous a laissé espérer, mais y a-t-il de quoi rêver ?
10 milliards
Ces 10 milliards évoqués pour revaloriser la profession ont rapidement été vaporeux. Injectés rapidement ? Etalés dans le temps ? On n’a pu que conjecturer. De 500 millions en année pleine, on est passé aux 400 inscrits au budget 2021. Et pour les années suivantes, il est probable que le reste dépende d’une loi de programmation, pas encore votée…Souhaitons que ces 10 milliards ne s’évaporent pas sous la loupe des retraites braquée en plein soleil sur des enseignants victimes de jeux d’écritures avantageux pour certains, mais en aucun cas pour eux.
Réévaluer, mais essentiellement les plus jeunes
Le Ministre avait clairement annoncé la couleur : « Ça touchera d’abord les plus jeunes des professeurs car ce sont les moins bien payés. Les augmentations que l’on va faire peuvent se traduire dès l’année prochaine, en 2021, par des hausses très substantielles pour les jeunes professeurs. Un professeur qui commence aujourd’hui gagne 1 600 euros mensuels. Ce n’est pas assez et ce que nous voulons dès l’année prochaine, c’est qu’il puisse avoir entre 70 et 90 euros nets par mois supplémentaires ». Depuis, et il l’a annoncé le 16 novembre 2020, Jean-Michel Blanquer a retenu le scénario qui consisterait à augmenter via une prime, les 7 premiers échelons, soit 31% des enseignants.
Et les enseignants ayant plus d’ancienneté ? Oubliés ? Ignorés ? C’est inacceptable et ça ne servira que l’outil statistique indiquant qu’il n’y a pas de bas salaires. Car ils seront tout juste moyens et l’investissement sur l’ensemble de la carrière ne sera, dans cette perspective, jamais récompensé. La profession stagnera dans des niveaux de rémunérations tout juste acceptables. Ce nivellement, lui, ne l’est pas. Comme pourboire, les enseignants ayant dépassé l’échelon 7 devront pour le moment se contenter d’une prime d’équipement informatique de 150 euros nets par an. Hourra.
Le SNALC demande une garantie sur une loi de programmation pluriannuelle, pour que cette revalorisation soit sécurisée et concerne la part fixe de nos traitements pour tous les échelons et tous les personnels.
Gel du point d’indice…
Nous ne cessons de pointer du doigt la baisse de pouvoir d’achat subie depuis des années. Le point d’indice gelé depuis 2010 fut dégelé à deux reprises : +0,6% en juillet 2016 et +0,6% en février 2017. Comme par hasard en période électorale. Plaisir estival de courte durée, le point a depuis été regelé. La conséquence ? Nos salaires sont inférieurs de 17% à la moyenne de l’OCDE ; et même 54% inférieurs aux salaires allemands. Phénomène amorcé en 1981, notre pouvoir d’achat baisse de 10% tous les 10 ans.
De 1981 à 2004, on a enregistré 20% de baisse du pouvoir d’achat. L’économiste Robert Gary-Bobo considère qu’il faudrait réévaluer le salaire des enseignants de 40% pour retrouver les conditions de vie des années 80. Nos voisins de l’OCDE ont bénéficié d’une hausse de salaire de 20% entre 2000 et 2010. Nous, pas. Les annonces de revalorisation de notre Ministre ne leurrent personne : le retard ne sera en rien rattrapé.
… et fonte du pouvoir d’achat
La baisse de nos salaires est multifactorielle. Tout d’abord, le thermomètre de la cotisation de pension civile a augmenté de 10,56% en 2018 puis de 10,83% en 2019 et pour finir de 11,10% en 2020. S’ensuit le transfert des primes en points sur lesquels on cotise contrairement aux primes : de – 13,92 € de prime en 2017, on est passé à – 32,42 € en 2019. Cela représente 389 euros annuels sur lesquels vous cotisez.
Pour finir, la MGEN indexe maintenant ses cotisations sur l’intégralité de nos revenus : salaire, heures supplémentaires et même activités extérieures pour ceux qui y ont recours ! En 2018, l’augmentation fut de + 3.8 à + 7,5 % en fonction de la formule souscrite et en 2019, + 0,50 à + 5,69 %.
La réévaluation promise ne nous redonnera pas le sourire : le glacier nous a vendu de la soupe dans un cornet percé ! Le compte n’y est pas et la fonte du pouvoir d’achat se poursuit dans une réchauffement climatique salarial.
Les propositions du SNALC
Nos propositions pour revaloriser la profession sont très claires :
- Création d’une indemnité de suivi des élèves de 2500€ par an spécifique aux PE (liaison avec collègue de l’année suivante, livrets de compétences, liaison entre cycles, PPRE à remplir, PAP, RDV parents, liaison AESH, relations avec RASED, dossiers GEVASCO, LSU, dossiers SEGPA, carnet de suivi et d’apprentissage, liaison CM2-6e, participation à l’équipe de suivi, à l’équipe éducative, évaluations nationales avec leur suivi…).
- Transformation en heures supplémentaires rémunérées des 108 heures annuelles incluses dans les ORS (soit trois heures hebdomadaires en moyenne annuelle).
La précarisation des professeurs des écoles inquiète les collègues et le constat n’échappe pas aux jeunes générations qui fuient la profession. Il est temps de changer ce paradigme.