Archives de catégorie : Snalc

Troubles dys : une fatalité d’opérette ?

« Hélène.
– Qu’est-ce que je vous disais, la Fatalité.
Calchas.
– C’est votre excuse… »

La Belle Hélène
Opéra-bouffe en trois actes de Jacques Offenbach
Paroles de Henri Meilhac et Ludovic Halévy

Chez Offenbach, la Fatalité est l’excuse idéale d’Hélène, pour sa cuisse légère, lorsqu’elle abandonne son mari Ménélas pour suivre le beau Pâris. Les troubles dys, depuis quelques décennies, offrent eux aussi une excuse confortable, une Fatalité d’opérette, à l’échec scolaire cette fois.

En France, le nombre d’orthophonistes a augmenté de 72 % entre 1995 et 2010. En 2013, dans son essai A l’école des dyslexiques. Naturaliser ou combattre l’échec scolaire ?, la maîtresse de conférence Sandrine Garcia montre que le diagnostic de dyslexie s’applique le plus souvent à des élèves dont les difficultés de lecture trouvent leur origine dans les modalités d’apprentissage auxquelles ils ont été confrontés, et non pas dans « des troubles spécifiques de l’apprentissage de la lecture » attribués à des déficits propres à l’enfant et que cette situation aboutit à une médicalisation abusive des difficultés prise en charge par des professionnels extérieurs à l’école, prêts à « traiter » le handicap prétendu « naturel » qui serait celui de l’enfant. [1]

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Le mot du président : Représenter sans déformer

Edito de la revue Quinzaine universitaire n°1464 du 15 avril 2022

Cet éditorial est garanti sans élections présidentielles.

Alors que nous sommes gavés d’analyses, de prises de positions et d’injonctions qui nous sautent à la figure dès que nous ouvrons un journal ou un écran, voire dès que nous adressons la parole à un ami ou un collègue, il me semble nécessaire de vous proposer un espace qui soit autre chose que pure immédiateté.

Si un syndicat professionnel et représentatif comme le SNALC ne pose pas les constats et ne tente pas l’expression objective de l’état de notre système éducatif, qui le fera ? Nous avons toujours eu comme principe fondateur notre indépendance, et partons du principe que les personnels de l’Éducation nationale et du Supérieur, qui ont charge d’âmes, n’ont pas besoin de directeurs de conscience pour glisser — ou ne pas glisser — un bulletin dans une urne.

Laissez-moi donc plutôt vous parler des mathématiques, qu’on tente in extremis de réintroduire en catastrophe après la saignée opérée lors de la réforme du lycée. Ou des colloques que le SNALC organise dans de nombreuses académies sur la souffrance au travail et les possibilités d’aller voir ailleurs, et qui font hélas salle comble. Je dis « hélas » car j’aimerais nous voir échanger, entre professionnels reconnus et respectés, sur les modalités de la transmission des savoirs, les techniques pédagogiques, les cultures professionnelles du premier et du second degré, la richesse de la voie professionnelle, plutôt que sur la désaffection des concours, la précarité des contractuels et le meilleur moyen de monter son auto-entreprise pour quitter au plus vite le navire.

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Période de réserve électorale et circulaires abusives

Des circulaires préfectorales concernant «la période de réserve électorale dans le cadre de l’élection présidentielle » (du 18 mars au 24 avril 2022) visant à « garantir la neutralité de l’État et des services publics » sont adressées par des préfets aux directeurs et chefs de service, eux-mêmes chargés de les transmettre « à l’ensemble des fonctionnaires placés sous (leur) autorité… ».

Ainsi, via les recteurs, DASEN, IEN et chefs d’établissement ces instructions arrivent dans les casiers et boites mail des collègues, générant un fort émoi. En effet, elles obligent «de s’abstenir de participer à toute manifestation publique susceptible de présenter un caractère pré-électoral » en raison « des discussions qui pourraient s’y engager » ou «de la personnalité des organisateurs ou de leurs invités ».

Ces circulaires dépassent largement le cadre de leurs attributions. Elles bafouent des droits constitutionnels, civiques et statutaires élémentaires comme les libertés de réunion, d’opinion, d’expression et oublient que le devoir de neutralité s’applique au cours de l’exercice des fonctions.

Rien n’empêche donc à un enseignant de participer à un meeting politique, à des discussions ou de rencontrer qui il souhaite durant cette période.

Il doit cependant appliquer son devoir de réserve, qui lui impose en dehors de son temps de travail, et notamment en public, d’agir simplement avec retenue, c’est-à-dire de ne pas exprimer des propos ou adopter des comportements diffamatoires, injurieux ou outranciers à l’égard de l’administration, de l’État et de ses représentants.

Ces circulaires en disent long sur les modes de gouvernance de l’administration qui n’hésite pas à méconnaître ni des droits fondamentaux des agents publics, ni la décision n°78156 du Conseil d’État qui pourtant depuis 1971 rappelle que «si les fonctionnaires ont, comme tout citoyen, le droit de participer aux élections et à la campagne qui les précède, ils sont tenus de le faire dans des conditions qui ne constituent pas une méconnaissance de l’obligation de réserve… ».