Le projet d’EPSF (Etablissement Public des Savoirs Fondamentaux) a fait l’effet d’une bombe lors de son annonce, à laquelle personne ne s’attendait. Plusieurs aspects ont fait bondir et réagir les enseignants, directeurs comme adjoints, mais aussi les familles, dès lors que les médias et les syndicats ont relayé cet amendement.
Sur le choix très discutable de la méthode tout d’abord, qui s’apparente à un passage en force. Cet article 6 quater du chapitre 1er du Titre II du projet de Loi BLANQUER a été présenté et voté en moins d’une heure à l’Assemblée nationale en présence d’un nombre très réduit de députés. Sans discussion préalable avec les partenaires sociaux. La façon de procéder est singulièrement cavalière.
Sur le point d’entrée d’une évolution de la direction d’école : ce projet n’est pas ce qui est attendu prioritairement sur le terrain. Il ne fait qu’ajouter de la complexité, en créant un maillon hiérarchique supplémentaire, en plus de l’IEN. Il va de surcroît diviser la profession en deux groupes, la majorité des directeurs étant écartés d’une évolution à laquelle beaucoup aspirent. Les missions de chacun étant par ailleurs très floues.
Si pour le premier degré, les EPSF semblent avant tout concerner les directeurs d’école, l’inquiétude touche tous les PE (Professeurs des Écoles) et tous les professeurs de collège. En effet, le projet consiste à regrouper des écoles rurales isolées de petites tailles au sein du collège de secteur (à l’initiative des collectivités locales) et à créer un poste d’adjoint au principal, en charge de la direction des écoles. Les craintes des PE sont nombreuses : passer sous la coupe du second degré, perdre la proximité avec les familles et les territoires, perdre le fonctionnement collégial de l’école pour adopter une structure plus verticale tout en aggravant les inégalités par l’abandon des territoires.
Pour les professeurs du second degré, ce changement systémique du fonctionnement des collèges laisse présager des risques importants : le cycle 3 (CM1, CM2, 6a) à cheval sur l’école et le collège et réunis de fait dans la même structure pourrait permettre de faciliter la gestion du déficit de professeurs dans certaines matières en poussant aux échanges de services entre les deux corps (rappelons-nous la réforme du collège 2016).
Nous rappelons aussi notre attachement à conserver des étapes dans le cursus scolaire, que ce projet aurait vocation à gommer : il nous semble important que les élèves continuent d’avoir à franchir des paliers, qui sont les marqueurs de leur évolution dans leur vie d’enfant puis d’adolescent. L’adaptation, c’est aussi ce qui aide à grandir.
Enfin, ce projet est axé sur une évolution de la structure, mais il ne tient pas compte des individus qui la composent. Les évolutions doivent aller dans le sens des personnels, ce qui rejaillira positivement sur le climat de l’école, mais aussi sur le bien-être et les résultats des élèves.
Même si le Ministère s’est voulu rassurant en envoyant une lettre aux 45000 directeurs précisant que ce projet d’EPSF ne serait établi que sur la base d’un consensus entre tous les acteurs de la communauté éducative (parents, enseignants, municipalités), le SNALC constate que le projet de loi BLANQUER sur cette question, comme sur beaucoup d’autres, ne répond absolument pas à l’attente des personnels. Il s’agit tout au mieux de micro solutions qui ne règlent rien. Ce projet d’EPSF est le fruit d’une vision purement comptable car il ne répond à aucune des problématiques quotidiennes des collègues : les difficultés des directeurs d’école, la fermeture des écoles rurales et montagnardes, la crise du recrutement, la montée de la violence dans les écoles, les abus de pouvoir de certains personnels ou encore, les nombreuses iniquités de traitement subis par les collègues (PPCR, hors classe, indemnités ou mouvement).