La question qui finit par se poser est la suivante : qui du système ou de ses personnels s’effondrera en premier ?
Les indicateurs sont clairs et disent tous la même chose : l’implosion est proche. Enquête « bien-être » aux résultats catastrophiques, hausse des incidents avec les élèves et avec les familles, crise des recrutements, difficultés structurelles dans la gestion de classe, sécurisation des bâtiments et des personnels non assurée, hausse des inclusions bien supérieure à celle des structures, dispositifs et moyens de cette inclusion. La crise est aujourd’hui structurelle. Et de quoi se préoccupe-t-on au ministère ? De labelliser les manuels scolaires. De multiplier les évaluations nationales. De changer (encore) les programmes et la place du concours. L’essentiel n’est plus assuré ? Vite, vite, occupons-nous de l’accessoire !
Au milieu de cette politique à courte vue, je tiens à mettre l’accent sur un dossier essentiel parmi les dossiers essentiels : celui de l’école inclusive, et de son « acte II ». Sur le papier, c’est formidable : on sera au plus près des besoins éducatifs particuliers de l’enfant. On aura des professionnels du médico-social sous la main pour intervenir directement dans nos classes et nos écoles, et pour faire des séances d’ergothérapie dans une salle qui n’existe pas. Car la réalité est tout autre : c’est celle d’une inclusion au rabais qui va se faire davantage encore au rabais. Pas question de restaurer les RASED que les précédentes politiques ont démolis ; pas question non plus d’augmenter l’accompagnement humain. Au contraire : la petite musique que l’on entend au ministère est celle de la « surcompensation », de l’AESH qui ferait obstacle à l’autonomie de l’enfant, quand ce n’est pas celle des méchants professeurs incapables d’adapter leurs pratiques pédagogiques à chacun, dans une école pour tous où, pour le même prix (et même moins du fait de l’inflation), il faudrait donner des cours particuliers à chacun dans des classes à 28.
Vous pensez que j’exagère ? Voici pourtant les propos tenus par le conseiller école inclusive à la délégation interministérielle sur les troubles du neurodéveloppement (c’est son titre) dans un article de Libération tout simplement intitulé « Scolarisation des élèves handicapés : les AESH sont-elles vraiment indispensables ? ». Accrochez-vous : « Lorsqu’on met une AESH dans la classe, ça peut décharger l’enseignant d’une part de son travail et il ne va plus penser à l’accessibilité de sa pédagogie, qui peut pourtant répondre à certains besoins. ». Tout s’éclaire : le principal obstacle pour l’enfant, ce n’est pas le handicap : c’est l’enseignant ! Et aussi l’AESH, visiblement.
Comment voulez-vous qu’on s’en sorte avec des énergumènes pareils, complètement déconnectés de la réalité de nos classes ? Rappelons que Gabriel Attal, à notre demande, avait promis que les organisations syndicales représentatives, dont le SNALC, participeraient désormais au comité de suivi de l’école inclusive : c’est une promesse qui tarde à se réaliser. C’est pourquoi le SNALC continue d’alerter à tous les niveaux sur les souffrances causées par une école inclusive qui ne se préoccupe ni du bien-être des élèves, ni de celui des personnels, qui saupoudre une aide humaine sous-payée et maltraitée, et qui a l’outrecuidance d’accuser celles et ceux qui maintiennent l’embarcation à flot d’être responsables du naufrage. Pour le SNALC, cette politique est l’illustration de tout ce qui se passe à l’Éducation nationale : affichage de bons sentiments, restrictions budgétaires, maltraitance et culpabilisation. Le premier employeur de France est désormais aussi le pire employeur de France.
Face à cela, vous pouvez compter sur le SNALC pour continuer d’œuvrer à l’amélioration de vos conditions de travail, y compris en proposant le suivi, le conseil, l’écoute et les aides pédagogiques et professionnelles que notre institution nous refuse. Alors avant d’imploser, n’hésitez pas à venir nous parler, car nous serons toujours à votre écoute.