Enquête SNALC
Les moyens
Si l’enseignant est responsable de sa classe, la responsabilité qui incombe au directeur en termes de mise en alerte et de prise de décisions est considérable. La configuration de l’école peut faciliter la mission de sécurisation de certains directeurs, mais parfois certains équipements s’avèrent nécessaires pour pallier les inconvénients d’un bâti qui n’offre pas les meilleurs atouts pour une protection optimale de l’école.
Parmi les équipements existants dans les écoles, nous constatons encore une fois que les moyens mis en place sont très disparates.
Certaines écoles semblent bien équipées, voire suréquipées, tandis que d’autres n’ont quasiment aucun équipement sécurisant.
S’il est évident qu’un portique ou un tourniquet ne peut équiper toutes les écoles, il ressort des témoignages que beaucoup de collègues aimeraient que certains équipements de surveillance permettant une intervention rapide des forces de l’ordre soient systématiquement installés aux alentours des écoles.
À noter : 47 % des collègues affirment que leur école est équipée d’un visiophone. Si cela semble être assez satisfaisant, cela reste insuffisant pour le SNALC car beaucoup de directeurs non déchargés d’enseignement doivent encore se déplacer en personne pour ouvrir les grilles.
Certains d’entre eux se retrouvent parfois plus de dix fois par jour forcés de quitter leur bureau ou même leur classe (alors qu’ils ne sont pas déchargés d’enseignement ce jour-là) pour ouvrir le portail à divers intervenants. Rappelons que le directeur ou la directrice a la responsabilité de l’entrée dans l’école de toute personne.
Dans les questions de l’enquête, il est apparu qu’une école sur deux n’a pas de visibilité sur les personnes qui se trouvent devant l’entrée, on comprend alors mieux l’intérêt de certains équipements énumérés dans le graphique ci-dessous.
Il ressort des témoignages recueillis deux positionnements diamétralement opposés. D’un côté, certains professeurs expriment la volonté de voir les écoles dotées d’équipements de sécurité modernes et sophistiqués. Ils souhaiteraient des établissements équipés de caméras de surveillance couvrant l’ensemble des zones sensibles, de tourniquets pour contrôler les flux d’entrée et de sortie, de services de sécurité présents en permanence, ainsi que de sas de sécurité avec des contrôles systématiques à l’entrée. Ces mesures, selon eux, permettraient de répondre efficacement aux besoins croissants en matière de sécurité scolaire et de garantir un environnement où élèves et enseignants se sentiraient protégés.
À contrario, d’autres professeurs s’opposent fermement à l’idée d’installer ce type d’équipements. Leur position repose sur une conviction profonde : les écoles doivent rester des lieux dédiés à l’éducation ouverts aux échanges, non des espaces assimilables à des institutions carcérales. Pour ces enseignants, multiplier des dispositifs de sécurité qui rappelleraient les prisons risquerait d’instaurer une atmosphère de méfiance, anxiogène, dénaturant ainsi la mission première de l’école. Ils craignent qu’un tel déploiement d’infrastructures sécuritaires n’impacte négativement la perception des élèves et ne fragilise le lien de confiance entre les acteurs de la communauté éducative.
Cependant, une majorité de collègues reconnaissent que si l’équipement et les infrastructures des établissements scolaires sont à ce jour largement insuffisants, la solution ne réside pas forcément dans la multiplication de systèmes de sécurité. Pour ces enseignants, la priorité doit être donnée à des investissements réfléchis et mieux ciblés, susceptibles de renforcer la sécurité tout en respectant la nature et les valeurs des écoles. La surveillance vidéo reste un des équipements de sécurité les plus plébiscités.
Citations et témoignages :
« Je suis directrice d’école depuis 17 ans ; il y a deux mois nous avons vécu une intrusion qui ne s’est pas bien passée. En effet, je n’ai pas pu donner l’alerte car au même moment qu’un parent d’élève pénétrait dans l’école, un élève en inclusion dans une classe de CE1 retournait tout dans la classe et il a fallu le maîtriser avec la collègue qui était terrorisée. Dans le même temps, le père de famille est venu en découdre avec une collègue avec laquelle il a été violent. Je suis en arrêt depuis quelques semaines car il m’est reproché de ne pas avoir donné l’alerte comme j’aurais dû le faire. Mais nous ne pouvons pas tout gérer. Je ne sais pas si je reprendrai. Il me reste encore 3 ans avant la retraite. Mais une chose est sûre : je ne veux plus avoir de direction d’école. »
« Il y a quelques mois, la mairie a fait mettre en place des caméras qui enregistrent les images systématiquement. Depuis ce temps, nous avons l’impression qu’il y a une prise de conscience par les parents que l’école est un lieu protégé. »
« Depuis l’installation d’un visiophone et d’une gâchette électrique au portail de l’école, ma vie de directrice d’école a changé. Je gagne un temps non négligeable au cours de la journée. »
« Je suis directeur, je ne vois rien de mon bureau ; à chaque fois que quelqu’un sonne, je dois me déplacer, cela me rend fou car depuis peu, c’est un jeu pour certains collégiens de me faire descendre les escaliers pour rien. Je demande un équipement à la mairie depuis 4 ou 5 ans. C’est ingérable seul. »
« Mon école est dans un quartier sensible, les intrusions, les menaces, les agressions c’est tous les deux jours. Aucun collègue ne reste sur son poste plus d’une année, d’ailleurs ils se retrouvent en arrêt maladie avant même la fin de l’année. Alors oui, il nous faudrait tout ce qu’il y a dans les propositions du questionnaire, mais nous n’avons rien de cela. »
« Il y a encore 20 ans, je n’aurais jamais pu imaginer réclamer des caméras pour surveiller les abords de l’école. J’aurais bondi et j’aurais trouvé cela scandaleux qu’un collègue puisse avoir une telle pensée. Mais j’en suis là. Je suis directrice de l’école et j’ai peur de venir travailler. Tous les jours. »
Position du SNALC :
En plus de la charge d’une classe qui incombe à la majorité des directeurs, ces derniers doivent assurer les missions liées à la gestion de leur école. Aujourd’hui, la protection de l’école et la sécurité des élèves et des personnels représentent une lourde charge de travail et de responsabilités.
L’institution estime que le directeur peut et doit tout faire, oublie le fait que la sécurisation est une mission qui doit être assurée en permanence.
Pour le SNALC, le directeur doit veiller à la sécurité de l’école. Le code de l’Éducation spécifie qu’il doit prendre « toutes dispositions (…) pour assurer la sécurité des personnes et des biens (…) ». Dans la réalité, en plus de tout ce qui est demandé par l’institution à la direction d’école, assurer la sécurité efficacement relève d’une mission impossible. Un directeur ne peut pallier seul les défaillances matérielles et techniques qui relèvent des compétences de la municipalité. Un directeur ne peut pallier seul les défaillances de formations qui relèvent de l’institution.
Un directeur d’école ne peut assurer la sécurité que dans la limite de ce qui relève de ses compétences.