À quoi bon demander leur avis aux directeurs d’école dans une enquête nationale en décembre 2019, si au final personne n’en tient compte ? A quoi bon réunir sans cesse les organisations syndicales sous prétexte de dialogue social si leurs remontées et revendications sur la direction d’école sont comme jetées aux oubliettes en un vote au Sénat le 10 mars 2021 ? A quoi bon prétendre redéfinir la direction d’école dans un Grenelle de l’Education coûteux et pompeux si c’est pour en conclure ce que le ministre de l’Education nationale et la majorité politique en place veulent déjà, c’est-à-dire le management?
Tout comme pour les questions sanitaires, le SNALC ose l’écrire : on se moque de nous !
Le Sénat, par son vote de la proposition de loi RILHAC, est venu remettre en question le fonctionnement caractéristique et essentiel de notre école. L’article 1, instaurant une « autorité fonctionnelle » du directeur d’école, tout en supprimant le passage indiquant qu’il n’est pas « le supérieur hiérarchique sur ses collègues », porte atteinte à une chose presque sacrée à laquelle il ne faut pas toucher : le subtil équilibre de notre école reposant sur un fonctionnement spécifique entre pairs. Dans une école primaire exercent des adjoints d’enseignement dont l’un d’eux est directeur d’école ou assume la direction de l’école lorsque le directeur est absent. La direction d’une école est occupée par un professeur des écoles parmi des professeurs des écoles. La moindre notion d’autorité – et encore plus avec la délégation de « l’autorité académique » – impliquera implicitement une autorité hiérarchique et la fin du Primus inter pares.
Au SNALC, nous ne sommes pas dupes. Nous siégeons dans les instances ministérielles, pour tous les corps du MEN. Nous n’avons pas claqué la porte du Grenelle, nous assistons et participons à toutes les réunions de l’agenda social, ce qui nous permet de défendre la direction d’école à chaque occasion.
Le SNALC a bien conscience que la direction d’école ne peut être qu’inévitablement impactée par la future fusion des corps d’inspection, le Plan national de Formation de nos formateurs et supérieurs hiérarchiques et le Grenelle et ses ateliers autour de la gouvernance et du management. Le pouvoir hiérarchique, dont la majorité des directeurs ne veut pas, est un peu trop souvent venu sur le tapis lors des discussions du Grenelle. Une fois le Grenelle terminé, la proposition de loi RILHAC revient sur le devant de la scène et propose une autorité fonctionnelle mais également académique, validée par un ministre de l‘Education nationale, fort désireux d’une autorité verticale au sein même de l’école.
Il est vrai que le statu quo n’est plus possible. Il est vrai que la situation des directeurs et directrices doit évoluer depuis fort longtemps. Il est vrai qu’il y a quelques avancées dans cette nouvelle mouture de la loi RILHAC.
Mais, si l’on n’y prend pas garde, cette loi, qui pour un non-initié semble ne concerner que la direction d’école, risque de nous faire basculer dans une école du XXIème siècle pensée et voulue par Jean-Michel Blanquer, et non par la profession et les premiers concernés.