École inclusive : audience du 25 octobre 2022

Compte rendu du SNALC

Pour le Ministère :
Jean-Marc HUART, directeur du cabinet du Ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse ;
Thierry LE GOFF, directeur adjoint de cabinet ;
Laurent CRUSSON, conseiller social du ministre ;
Marc ESTOURNET, chef de service, adjoint au directeur général des ressources humaines ;
Nicolas KANHONOU, conseiller école inclusive ;
Édouard GEFFRAY, directeur général de l’enseignement scolaire
Pour le SNALC :
Jean-Rémi GIRARD, président du SNALC
Danielle ARNAUD, secrétaire nationale du SNALC chargé des personnels contractuels

Thème

Bilan et perspectives sur l’Ecole inclusive

L’essentiel

Il s’agit pour le ministère d’un tour de piste pour entendre les organisations syndicales représentatives sur l’école inclusive et voir les propositions que ces dernières pourraient faire. L’objectif est aussi de partager des éléments de bilan.

Le ministère a affirmé que le bilan de l’école inclusive était un succès pour l’Education nationale, succès de l’institution et des personnels. Il a rappelé l’investissement humain très important de la part de l’ensemble des personnels (depuis 2005, avec accélération depuis 2017), comme l’investissement budgétaire, avec un effort de 3,5 milliards d’euros l’an dernier pour l’école inclusive, tout dispositif confondu, dont des recrutements importants d’AESH.

Toutefois, le ministère reconnaît un sentiment d’incomplétude ou d’insatisfaction, car des problématiques persistent.

Depuis 2017, on constate une hausse de 10% par an des notifications.

AESH : 132000 personnes physiques à la rentrée 2022 (1 AESH pour 8 professeurs).

Recrutements d’AESH : + 8000 ETP/an au début du quinquennat, + 4000 ETP à la rentrée 2021, idem à la rentrée 2022, et idem à la rentrée 2023.

Le ministère dit qu’il y a eu des avancées pour les AESH, dont la fin des contrats aidés, la mise en place des CDD de 3 ans, de la formation initiale des 60 heures et de la grille de progression salariale. Mais il reconnaît que des problèmes subsistent, notamment les temps incomplets, l’explosion des notifications MDPH et les difficultés à recruter des AESH.

Il a également conscience de la problématique de l’articulation entre le scolaire et le médico-social, dont les difficultés à avoir plusieurs adultes dans une classe avec des élèves en situation de handicap (ou l’inverse, manque d’adultes).

Suite à cette première rencontre, des groupes de travail ou débats devraient suivre, sur :

  • Le processus d’évaluation des besoins des élèves en situation de handicap et d’orientation de ces élèves (travail avec les MDPH)
  • Le rapprochement entre les établissements spécialisés et l’Education nationale (soit l’articulation médico-social / EN)
  • La cartographie des dispositifs (maillage territorial de ces dispositifs, par exemple les ULIS, la prise en charge des élèves à besoins particuliers, au-delà des élèves en situation de handicap…)
  • Le statut des AESH, dont les missions et l’articulation avec le périscolaire

Le SNALC a insisté sur

… le fait que l’école inclusive connaît de graves dysfonctionnements. D’ailleurs le ministère a lui-même listé de très nombreux problèmes, après son constat de succès de l’inclusion. Pour le SNALC, le problème initial est la mauvaise gestion de la massification de l’école inclusive. Il n’y a pas eu de réflexion menée en amont pour savoir comment y arriver, et l’inclusion se fait souvent au rabais, en faisant de surcroît des économies via la fermeture de structures spécialisées comme les IME, qui ne peuvent pas accueillir l’ensemble des enfants disposant d’une notification IME.

Le sujet n°1 de l’école inclusive pour le SNALC est la souffrance au travail des personnels, qui est générale, mais plus importante encore dans le premier degré. Tous les PE ou presque ont aujourd’hui au moins un vécu de l’école inclusive qui s’est mal passé. Par conséquent, il y a un besoin urgent d’essayer de trouver des solutions, d’autant plus que le phénomène ne fera que s’amplifier, avec de plus en plus de pénibilité au travail, de burn out, de démissions… Il est d’autant plus difficile d’exprimer les difficultés de l’école inclusive dans la mesure où c’est un sujet hautement sensible.

Aujourd’hui, il y a besoin d’une structure de dialogue entre tous les acteurs de l’école inclusive. Concernant le Comité national de suivi de l’école inclusive, non seulement il ne se réunit que rarement, mais surtout il se réunit sans les représentants des personnels. Il faut que tous les acteurs de l’école inclusive — ministères, syndicats représentatifs, associations, MDPH… — se mettent autour de la table. Les mécanismes mis en place doivent être analysés. Par exemple, y-a-t-il eu des notifications établies en fonction de ce que l’élève peut obtenir comme accompagnement et non en fonction de ce qu’il a besoin ? Le SNALC rappelle qu’une notification pour un élève en situation de handicap est une compensation, qui doit être idoine, et ne peut être traitée qu’au cas par cas.

Par ailleurs, ce travail de compensation du handicap n’est pas reconnu (financièrement ou en termes de temps libéré) chez les enseignants, et plus largement pour l’ensemble des personnels. Or, la prise en charge d’élèves en situation de handicap, au-delà du nombre de ces élèves dans une même classe, nombre qui peut parfois être élevé, entraîne une augmentation de la charge de travail. De plus, les préconisations médicales sont parfois compliquées à mettre en œuvre par les collègues. L’école inclusive se limite très souvent à mettre des croix dans des cases, à recruter des AESH et à fournir du matériel informatique.

Il y a donc un dysfonctionnement réel et les choses doivent être posées avec pragmatisme.

Le SNALC avertit solennellement le ministère qu’on est en train d’assister à une radicalisation des positions des 2 côtés (côté associations de parents comme côté personnels de l’Éducation nationale). Il y a urgence à discuter, à travailler tous ensemble, à dialoguer, et ce régulièrement, car l’école inclusive ne fonctionne pas. Le SNALC propose donc d’adapter le modèle de l’instance partenariale mise en place au moment de la crise sanitaire liée au COVID.

Enfin, le SNALC est revenu sur l’urgence à revoir la grille indiciaire des AESH (dont la mise en œuvre ne remonte pourtant qu’au 1er septembre 2021…). Si les AESH en CDD sont déjà tous rémunérés à l’indice plancher, demain (fin 2022, début 2023), des AESH en CDI seront également rémunérés à l’indice plancher. Où est la progression salariale annoncée en début de réunion par le ministère ? Où est l’engagement de convoquer rapidement des GT sur la refonte de la grille indiciaire pris par le ministère lors de l’audience intersyndicale consacrée aux AESH, le 19 juillet dernier ?

Le SNALC rappelle que le multi employeur ne peut pas être la solution à une hausse de la rémunération, et que le ministère ne fait qu’institutionnaliser une pratique déjà en cours, en raison des temps incomplets et des salaires incomplets des AESH.

Nous avons à nouveau interrogé le ministère sur les conventions EN – Collectivités territoriales pour les missions réalisées sur le temps périscolaire (depuis la décision du CE du 20 novembre 2020, sur l’obligation de financement des activités périscolaires par les collectivités territoriales). Enfin, nous avons émis des réserves sur le bulletin de salaire unique, regroupant activités scolaires et périscolaires, en l’absence d’un contrat unique.

L’avis du SNALC

Si l’école inclusive est présentée par le ministère comme un succès de l’Éducation nationale — même si l’on entend que le discours tenu comporte en réalité des réserves parfois assez sérieuses —, l’appréciation n’est pas du tout partagée par le SNALC

Dès 2016, le SNALC avait mis en garde sur une massification de l’inclusion dans de mauvaises conditions : force est de constater qu’une fois de plus il a eu une position d’avant-garde sur la question.

Même si le ministère a été attentif à nos remarques, propositions, questions…, et s’il a l’intention d’avancer, c’est-à-dire de nous apporter des réponses sur la situation des AESH, le lien EN-médico-social, sur la formation et l’accompagnement des personnels, nous restons assez dubitatifs sur l’issue véritablement favorable de ces GT pour les personnels, mais également pour les élèves et leurs familles, en grande souffrance, résultat d’une inclusion au rabais.

Que cette souffrance des personnels soit connue est indispensable, mais il faudrait surtout qu’elle soit reconnue pour les personnels, y compris financièrement comme dans les conditions de travail (taille des classes, temps libéré…). C’est tout l’enjeu des suites données à cette première réunion bilan et perspectives sur l’école inclusive.

Quant à la question des trop faibles salaires des AESH, elle ne pourra pas être traitée indépendamment de celles du statut des AESH et de la redéfinition d’un temps complet pour une ou un AESH. Malgré l’urgence de cette problématique salariale, le SNALC craint que rien ne se passe avant septembre 2023. Quant au mot « PIAL », il n’a jamais été cité par les représentants du ministère, durant ces 2 heures de réunion. Le ministère a probablement gardé en mémoire nos réactions lorsqu’il nous avait interrogés sur les PIAL le 19 juillet dernier en audience intersyndicale. Le SNALC continue de demander l’abandon des PIAL.

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